CRITIQUES DE LIVRES

LA COURSE ESPEREE
ou la prise de conscience

par Romain MALANIER.

Ouvrage publié à compte d'auteur - Avril 2003
(disponible sur demande à : lacourse@2m2.fr).

 

Inspiré par le livre de Max Liotier, "Celui qui va devant", l'auteur prend prétexte à une ascension de la Meije pour laisser son esprit vagabonder autour de quelques uns des grands problèmes de ce nouveau siècle...

La préparation de la course, la marche d'approche, l'arrivée au refuge, la course elle-même, sont décrits avec une précision méticuleuse (oserais-je dire "clinique" ?), qui a au moins l'avantage de rappeler des souvenirs, et en tous cas d'impliquer les lecteurs ne pratiquant pas l'alpinisme.

Pendant les longues marches d'approche, ainsi qu'aux moments d'inaction au refuge ou au sommet, l'esprit s'évade... Je me souviens toujours de cette phrase, saisie au vol lors du croisement d'un groupe de randonneurs : "Je trouve que les gérontologues russes manquent totalement de sens de l'humour"... Incongru ? Pas vraiment... La monotonie de la marche libère l'esprit, et la grandeur des paysages cotoyés autorise la philosophie...

D'ailleurs, il m'arrive souvent d'aller marcher, quand j'ai besoin de réfléchir. Pas vous ?

 

C'est ainsi que Marc, c'est-à-dire l'auteur, évoque successivement la formation des montagnes, la constitution du Parc National des Ecrins, la fonte des glaciers, et même (le soir, sous les étoiles), la génèse du Monde... La statue de la Vierge, au sommet, entraine naturellement à une réflexion sur les religions, puis, tout aussi naturellement, au scientisme puis au matérialisme, et finalement aux manipulations génétiques...

Marc se demande également quelle est la motivation de l'alpiniste qui risque sa vie en se plaçant dans des situations extrêmes, et s'étonne que les sportifs aient maintenant recours à des moyens "artificiels" pour améliorer leurs performances.

Un arrêt "naturel" des dames de la cordée provoque une réflexion sur les différences entre l'Homme et la Femme. Et l'obscurité dans laquelle se poursuit le retour de course entraine à imaginer ce que sera la société future, mondialisée et dont les régles sont dictées par les sociétés multinationales.

Comme il ne faut pas en rester là, et qu'il faut bien proposer des solutions, Marc termine en énonçant les "quelques règles fondamentales qui devraient sous-tendre le fonctionnement de toute organisation sociale". Je vous laisse les découvrir.

Le texte est bien écrit, et se lit facilement. L'auteur s'est certainement bien documenté, et prend plaisir à "refaire le monde". Lequel d'entre nous ne se livre à cette occupation occasionnelle ?

Pour ma part, je regrette que cet exercice n'ait pas été mis à profit pour exprimer des idées vraiment originales. Je n'ai en vérité pas vu grand chose ici que je n'ai déjà lu ailleurs... Dommage... Marc remarque à juste titre que d'envoyer des sacs de farine ne résoud pas la faim dans le monde, mais par ailleurs les "principes" énoncés à la fin ne résolvent pas non plus les problèmes, car ils ne tiennent peut-être pas bien compte des motivations et des contraintes des "politiques" et des dirigeants d'entreprises, pas plus que des différences culturelles entre les peuples.

Au moins cette lecture a-t-elle pour avantage de faire un peu réfléchir... Elle pourrait alimenter de longues discussions... et je ne vais pas profiter de cette tribune pour exposer mes idées, parfois identiques, parfois différentes de celles de Marc...

Sur le plan formel, je regrette qu'il reste encore d'assez nombreuses erreurs typographiques, certaines étant d'ailleurs dues probablement à l'utilisation de "correcteurs d'orthographe" : des noms propres, comme "le Pas du Chat" ou le "Dos d'Âne" sont écrits sans majuscules. Plus gênant, le "fort intérieur"... Je pense enfin que la qualité excellente du papier aurait sans doute permis d'imprimer les photos avec plus de détails...

Daniel MASSE.

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