CRITIQUES DE LIVRES

GEIGER, PILOTE DES GLACIERS

 

 

par André Guex

Arthaud, Paris, Grenoble.

(Revue " La Montagne et Alpinisme" - No 66, Février1968)

Cette nouvelle édition complète une oeuvre unique en son genre. On y retrouve, avec d'admirables photos, la naissance d'une vocation , l'apprentissage d'un pilote qui, en mai 1952, réalise son premier atterrissage sur glacier, et la recherche d'une méthode qui "un jour sera suffisamment mise au point et codifiée pour devenir l'objet d'un enseignement systématique". La seconde partie, inédite, retrace la progression de sa technique, ses premiers remorquages "en vol" d'avions accidentés, des sauvetages, aventures partagées avec un grand et fin pilote, son ami Martignoni.

Et puis, un jour, le 26 août 1966, le cercle se ferme : après avoir décollé, Geiger se tuera au dessus du terrain de Sion, à l'endroit où, environ 36 ans plus tôt, il effectuait son premier vol...

Ceux qui ont volé avec lui se souviendront toujours de cet émerveillement qu'il avait d'atterrir sur un glacier, de fouler la neige, de regarder autour de lui, de son bonheur de voir partager son amour du ciel et de la montagne, de cette confiance, non dénuée de risques, mais si encourageante, qu'il témoignait à son élève en le laissant voler et se poser seul dans l'OPU son avion rouge tout neuf, pendant qu'il restait stoïquement au sol, pour permettre au pilote cette joie irremplaçable des premiers vols sans moniteur. La technique évoluera, mais l'oeuvre de Geiger restera, car il a osé faire systématiquement, le premier, ce qui pour ses prédécesseurs n'étaient que de magnifiques exploits sans lendemain.

Tous doivent lire ce nouveau Pilote des Glaciers : ceux qui ont déjà le premier recueil, pour le compléter ; ceux qui ne l'ont pas, pour suivre l'aventure d'un homme qui fut exceptionnel ; ceux qui pratiquent l'alpinisme et n'apprécient pas l'aviation, pour leur rappeler que, s'ils se blessent, ils auront le réconfort de voir apparaître un pilote tombé du ciel pour les redescendre dans la vallée ; ceux qui aiment la montagne ou le ciel, ou les deux, pour connaître un aviateur montagnard qui sut concilier la terre et les nuages, le service des hommes et celui des bêtes ; et ceux qui n'aiment rien pour leur apprendre à aimer quelque chose enfin.

Jacqueline MAILLARD.