CRITIQUES DE LIVRES

PREMIÈRE ASCENSION NÉPALAISE DE LA TOUR EIFFEL
suivi de L'INDICATEUR BERTRAND

par Pierre CHARMOZ

( Ed. Deleatur, Angers. 1984 )
(Revue " La Montagne et Alpinisme " - No 3, 1984)

La bande qui entoure ce mince ouvrage rappelle que Pierre Charmoz est l'auteur de Cime et Châtiment. Publié il y a deux ans, Cime et Châtiment était un roman policier, un polar, dont les péripéties se déroulaient dans les milieux chamoniards les plus branchés. En fait, il se singularisait moins par le choix du genre (il y a quelques précédents) que par la place qui y était accordée, non à la recherche de l'absolu, mais au culte d'Éros. Celui-ci avait tenu une place imperceptible dans la littérature alpine (exception faite de la Voie Jackson).


Vous nous direz qu'on ne va pas en montagne pour cela. Bien sûr, mais il peut y avoir des rencontres, des occasions. Quoi qu'il en soit et sans doute pour compenser un siècle de continence, Pierre Charmoz avait fait très, très bonne mesure. Le reste du texte était drôle et l'ensemble constituait un plaisant défi aux conventions et nobles sentiments qui caractérisent les livres de montagne.

Le nouvel ouvrage est une relation à rebours, une sorte de contretype. Des grimpeurs népalais viennent à Paris pour escalader la tour Eiffel. Rien ne manque dans ce court récit de ce que l'on trouve habituellement dans les épopées himalayennes : marche d'approche en terrain inusuel, singularité des autochtones et de leurs habitudes alimentaires, difficultés des échanges, etc. On recrute des smicards et des Géhachems (porteurs d'élite) dont les chutes mortelles jalonnent l'escalade d'incidents regretta­bles mais inévitables. II y a des gags excellents comme l'entraînement préalable au CO 2.

Dans la deuxième partie on se retrouve à Chamonix; l'un des protagonistes de Cime et Châtiment, devenu privé ou agent immobilier, escalade l'aiguille de l'M en compagnie d'une blonde vaporeuse. Est-ce la fatigue consécutive au premier ouvrage ou un remords tardif, les ébats amoureux sont, cette fois, des plus limités. L'histoire assez anodine et les allusions à un personnage qu'on ne voit jamais, tout cela laisse supposer un sens ésotérique qui nous a échappé.

Ajoutons que les citations données en exergue semblent imaginaires, ce qui confirme le côté canularesque de l'ouvrage.

Mais qui donc se dissimule sous le pseudonyme de Pierre Charmoz?


Henri ISSELIN.

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